Que d'eau que d'eau
Le déluge, roman photo à tendance mélo pour te faire pleurer derrière ton écran, il le faut puisque c'est l'à faire du mois de novembre.
Lentement, sûrement, ils avancent.
Un mâle et deux femelles, pour la biodiversité et la multiplication des gamètes et des mamours mammouthiens.
Ils marchent depuis des jours, poussant de leurs larges fronts les obstacles, vieilles branches, roches glissantes, traversant des déserts trempés des sols gris et fripés comme la peau de l'éléphant, se protégeant sous des couvertures de hasard du froid et de la pluie incessante et glacée qui les accompagnent depuis le début de leur voyage.
Plus vite, plus vite !
Je n'en peux plus, laissez-moi mourir ici et maintenant.
Non ! En avant, il nous reste une chance, allez, debout !
Jamais nous n'arriverons à temps...
Et de fait, malgré leur obstination, leur courage et leur formidable puissance, quand ils arrivent épuisés à la rive promise, le sauvetage organisé du vieux père Noé vient de prendre fin. Ils n'ont que le temps de saluer la girafe et tous leurs cousins qui s'éloignent d'un barrissement où se mêlent désespoir et résignation.
Puis, pour devancer la terrible menace qui les guettait, tapie sous les herbes, blottie au fond des grottes, cachée sous les pierres innocentes du chemin depuis le début de leur errance, ils se couchent sur le flanc, comme de grosses collines poilues, laissant petit à petit l'eau les submerger et la vie les quitter à jamais.
pour le happy end tu repasseras
Lecteur à l'imagination débordante comme un fleuve en crue et crois-moi je m'y connais, quand tu passeras dans une campagne vallonnée, dis-toi que peut-être sous cette colline dort une de ces grosses bêtes qui connurent l'homme il n'y a pas si longtemps.
Pour moi, quand je roule avec Fidel dans les environs de Durfort (où fut trouvé un squelette de mammouth conservé au Muséum d'Histoire Naturelle de Paris) je les vois reposant sous les chênes verts, les buis et les genévriers, piétinés jadis par leurs frères de laine, les moutons, et aujourd'hui par les chasseurs et les sangliers qui s'y ébattent, le dimanche pour les uns, tous les jours pour les autres.
C'est que le père Noé, dans sa grande sagesse, n'a oublié d'emporter ni les chasseurs, ni les sangliers.
Pour réaliser ce roman poignant et véridiquement vrai, aucun animal n'a été maltraité, tout juste un peu mouillé à l'eau du Vidourle puis rincé à l'eau du robinet et reposé incognito sur l'étagère.
(savais-tu qu'il y a deux sortes de mammouths en plastique ? Ceux qui flottent et ceux qui ne flottent pas)