Vacheries
Parce qu'il commence à faire chaud
Et que les élections approchent
Une chronique villageoise de l'été dernier.
Qui sera encore valable l'été prochain, peut être...
sans doute.
C’est la fête.
Egayés par les boissons locales, attablés entre copains, les hommes blaguent.
Le verbe haut - seraient-ils sourds ? - entre eux, ils parlent fort une langue entrecoupée de huchement.
Est-ce un vestige du temps où tout homme de ce pays, le soir venu, avait un troupeau à rassembler ?
Quand ils n’ont plus soif, on les lâche dans les rues du village, entourés de barrières, pour qu’ils s’amusent à escagasser des petites vaches noires et sérieuses qui courent plus vite qu’eux, encadrées de chevaux camarguais aux cavaliers de Provence.
Les voilà cow-boys.
Ils courent, crient, tirent une queue noire, escaladent barrières et bord de fenêtre, joie et victoire.
La vache, agacée de ce tumulte, cherche parfois à s’échapper. Elle se réfugie alors dans le café déserté, d’où on la déloge à son corps défendant, les uns tirant les cornes, les autres poussant derrière, sans même lui offrir un coup à boire.
C’est lourd, une vache.
Les animaux rangés, la soif revient. Les émotions sans doute.
Tous au café.
Dans la rue dont le sol bitumé est strié de blanc, il flotte un parfum rustique, mélange subtil de bouse, d’anis et de crottin.
A petits pas, une dame sort alors de sa maison pour aller ramasser avec seau et pelle le précieux crottin et la jolie bouse qu’elle offrira à son rosier.
Une fanfare approximative joue une espagnolade, on entend mugir à la terrasse du café.
Les vaches sont reparties en camion.
A la manade elles paissent, silencieuses, loin de la foule.
Jusqu’à la prochaine fête.